Leçon de géographie (pour vous orienter avec le fil de la planète poésie !)

Invisible, désaccordé, ce fil tendu entre nous et le soleil des pôles, fait saigner la musique des glaces.
Nous le tracions scrupuleusement sur nos mappemondes vierges avec une pointe de jalousie pour les navigateurs. Pourtant, sa dureté n’entamait aucun de nos rêves.
La pelote achevée, nous défaisions fil à fil, latitudes et longitudes pour ouvrir la prison de nos leçons de géographie.
Nous nous évadions ainsi du maillage des peuples pour dériver au fil de quelques vérités apprises, nous nous perdions un peu entre l’océane candeur des îles et l’âpreté des toitures alpines.
Nous écorchions nos mémoires sur des cratères géants et nous dévidions nos vertiges dans le sillon des aviateurs.
Nous aimions ce frisson comme des apprentis funambules qui démaillaient le vide et avalaient leur fil.
Si nous jouions à découdre le vent, c’était pour rejoindre la vague enroulée comme une bobine d’écume, c’était pour échapper au maître, tirant chaque fil de sa leçon pour faire tourner le monde comme une toupie folle entre le solstice et l’équinoxe de nos rêves.

Jean Marie Rohé